Il y a 50 ans, le 11 février 1957 mourrait guillotiné à Alger dans la prison de Barberousse,
Fernand IVETON
condamné à mort par le colonialisme.
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HISTOIRE in l"HUMANITE du 12 février 2007
Exécuté pour l’exemple par la justice colonialeAlgérie . Il y a cinquante ans, le 11 février 1957, Fernand Iveton, trente et un ans, militant communiste, accusé de terrorisme, était guillotiné. Sa grâce a été refusée par le gouvernement de Guy Mollet.
« Je vais mourir, mais l’Algérie sera indépendante » furent les derniers mots prononcés par Fernand Iveton, avant d’être guillotiné juste après Mohamed Ounouri et Ahmed Lakhnache, le 11 février 1957 à 4 h 30 du matin. « Ce matin, ils ont osé/ Ils ont osé/ Vous assassiner/ C’était un matin clair/ Aussi doux que les autres/ Où vous aviez envie de vivre et de chanter (...) », déclamait dans un poème écrit après son exécution Annie Steiner, alors jeune militante détenue dans le quartier des femmes de la prison de Barberousse d’Alger (1). Fernand Iveton avait trente et un ans, ses deux codétenus, un peu plus de vingt ans. « Nous avons voulu sa mort et nous l’avons obtenue sans défaillance », écrivait ce jour-là Jean-Paul Sartre. « Les 300 condamnés à mort d’Algérie sont, pour la plupart, des otages que l’on veut fusiller », dénonçait l’écrivain et journaliste communiste Pierre Courtade dans l’Humanité.
Rencontrée dans une librairie à Alger, Annie Steiner se souvient encore de ce 11 février 1957 quand sa compagne de cellule, Yvette Bacri, l’a réveillée. « Annie, réveille-toi, ils emmènent Fernand », lui crie-t-elle. Elle avait reconnu la voix d’Iveton quand il était passé devant le quartier des femmes encadré par des gardiens qui l’emmenaient vers le lieu de son exécution. Il était en train de chanter. « Il s’est dirigé vers la guillotine comme s’il allait revenir », écrit alors Étienne Fajon dans l’Humanité. « Tous les détenus, c’était la tradition quand un militant était exécuté, ont commencé à crier, à faire du bruit avec n’importe quoi et à scander "tahia el-djazaïr" (vive l’Algérie). Après sa mort, on a fait une grève de quarante-huit heures », ajoute Annie Steiner. « La vie d’un homme, la mienne, compte peu, ce qui compte, c’est l’Algérie, son avenir et l’Algérie sera libre demain », déclarait-il au greffe de la prison, quelques minutes avant son exécution. Au pied de la guillotine, il a embrassé ses deux codétenus qui allaient être exécutés avant lui (2). « Celui-là, fut un condamné à mort modèle, droit, impeccable, courageux jusqu’au couperet », relate son bourreau, Fernand Meissonnier (3).
Exécuté pour l’exemple, Fernand Iveton était accusé d’avoir tenté, selon l’expression du ministre résident en Algérie, le socialiste Robert Lacoste, d’avoir voulu « faire sauter Alger ». Or, s’il a, certes, déposé une bombe dans les vestiaires de l’usine de gaz d’Alger, elle ne devait exploser qu’une fois les employés partis. Selon Jacqueline Guerroudj, qui lui a remis la bombe, Iveton avait exigé qu’elle ne fasse aucune victime civile. Il voulait des « explosions témoignages » pour faire avancer la cause de l’indépendance sans faire de victimes civiles. De ce fait, la bombe, de faible puissance, avait été réglée pour exploser le 14 novembre 1956 à 19 h 30. À cette heure, il n’y avait plus personne sur les lieux de travail, rapporte l’enquête. D’ailleurs, les artificiers l’avaient désamorcé vers 18 heures.
Arrêté sur dénonciation, le 14 novembre 1956, Iveton est présenté devant le tribunal permanent des forces armées d’Alger dix jours après, le 24 novembre, rasé, sans moustache, le visage marqué par les coups. Le procès se déroule dans une atmosphère de haine. La presse coloniale titre « Iveton le dynamiteur ». Quand il fait son entrée dans le tribunal, des insultes fusent à son endroit, le public exige sa mort et ses avocats sont menacés. Le procès est expéditif : il est condamné à mort le jour même pour terrorisme. En vérité, son sort avait été réglé en France. Sur proposition du garde des Sceaux, François Mitterrand, le gouvernement socialiste de Guy Mollet avait décidé que l’examen des recours des militants du FLN serait accéléré et que ceux dont la grâce était refusée par le chef de l’État seraient exécutés au plus vite. Le 10 février 1957, son recours en grâce est rejeté par le président René Coty.
Né à Alger le 12 janvier 1926, Fernand Iveton a suivi l’itinéraire classique du militant communiste. À quatorze ans, le certficat d’études primaires en poche, il quitte l’école pour travailler. À seize ans, il adhère au Parti communiste algérien (PCA), dont il diffuse l, Liberté, et les appels à la sortie des stades d’Alger. Ouvrier tourneur, à l’usine Lebon, puis à l’usine de Gaz d’Alger, délégué CGT, il est de toutes les luttes sociales. Et quand débute la guerre d’indépendance algérienne, il s’engage dans les Combattants de la libération (CDL) mis en place par le PCA. Aujourd’hui, cinquante ans après, ses amis à Alger commémorent le cinquantième anniversaire de sa mort au cimetière d’El Alia et ils réclameront une nouvelle fois qu’une rue de cette capitale qui l’a vu naître porte son nom (4).
(1) Poème cité dans le Peuple algérien et la guerre,
lettres et témoignages, de Patrick Kessel et Giovanni Pirelli ; Éditions Maspero, Paris 1963.
(2) idem
(3) El Watan du 17 février 2005,
« Qui se souvient de Fernand Iveton ? »
(4) Une impasse, à peine longue de 30 mètres, dans le quartier de Madania (ex-Clos Salembier) où il est né, porte son nom.
Lire également, Pour l’exemple : l’affaire Fernand Iveton, de Jean-Luc Enaudi, Éditions l’Harmathan. Paris.
Hassane Zerrouky
Henri Alleg :
« Un crime d’État, signé du gouvernement de l’époque »L’auteur de la Question évoque l’exécution de Fernand Iveton, qui fut l’un de ses camarades de combat.
interview du Président de l'ACCA paru dans l'HUMANITE du 12 février 2007
Extrait du roman de Jean Fouquet
LA BOU-NOURA - dédié à la mémoire de Fernand Iveton . ( Sable et Eau Éditions )
IL Y A CINQUANTE ANS,
11 Février 1957
Le lendemain matin, vers les quatre heures, criblé de cris de serrures et de vrombissements de moteurs,un nuage de ouate enveloppa la prison de Serkadji. Puis la rumeur dévala de la Casbah jusqu’au Front de Mer, à Belcourt,au Hamma. Les femmes ouvrirent les fenêtres sur la nuit inondée d’une lune cruelle. Les you-you de protestation, de haine,de douleur, n’ avaient plus rien de gueulements humains : les rues désertes bruissaient de glapissements de hyènes.
Je te donne tout ce que j’aime
Je te donne ma vie
O mon pays, … ô mon pays !
Certains des communistes qui se trouvaient à Alger cette nuit là risquèrent un timide signe de croix ; d’autres levèrent le poing en silence en direction du Gouvernement Général.
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<< L’impensable s’est cependant réalisé >> écrivait la journaliste Madeleine Jacob dans Libération. A l’impensable il était vain d’ ajouter des mots, il était vain de jeter du sel sur la blessure fraîche : elles pleuraient ensemble et tout était dit .
Un livre pour que la 11 février 1957
Fernand
IVETONmémoire des plus humbles ne se perde pas
Roman naïf et cruel, l’ouvrage nous ramène aux heures les plus brûlantes de la guerre d’Algérie ; il a fait l’objet d’un article dans l’Humanité du 17 Janvier 2006 ( Récits du poison colonial ).
LA BOU - NOURA , roman , par Jean Fouquet
1 volume de 176 pages - 17 Euros franco disponible à l'ACCA.
Pour l'exemple - l'affaire Fernand Iveton - Enquête - L'harmattan ; Histoire Perspect.méditerranéennes -1986-
Quatrième de couverture Fernand Iveton. Ce nom vous évoque-t-il quelque chose ? Savez-vous qu'il fut le seul Européen condamné à mort puis exécuté comme membre du FLN algérien ? Et qu'on le guillotina, un certain matin de février, alors qu'il n'avait ni tué ni même blessé qui que ce soit. Cela eut lieu en 1957. En des temps terribles que l'on appela " la bataille d'Alger ". Ce livre vous raconte la tragédie de cet homme. La rencontre d'une vie et d'une époque. Il s'agit d'une enquête. Au fil de plus de trois années, des deux côtés de la Méditerranée, l'auteur a retrouvé les acteurs du drame, recueilli les témoignages, rassemblé les documents. Evitant les commentaires, il a voulu vous restituer les faits.
Mais les silences aussi étaient au rendez-vous. Il faudra attendre l'an 2057 pour que le dossier Iveton soit accessible au public ! L'affaire Fernand Iveton fait pourtant partie de notre histoire. Mais elle en est un des moments enfouis, dissimulés, oubliés. Dérangeants. A vous, maintenant, de la découvrir.
L'histoire d'un pied-noir qui déposa une bombe en novembre 1956 dans une usine à Alger, et qui fut arrêté le jour même, torturé, et exécuté trois mois plus tard.
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( note des EP : Fernand Iveton fut guillotiné à Alger en février 1957, alors que le garde des sceaux s'appelait François Mitterrand. )
- le second poème est dédié à Fernand